Deux défilés consacrent la libération de Montpellier
Comme dans beaucoup d'autres villes, la libération de Montpellier s'étale sur plusieurs journées. Une série d'événements, petits ou grands, des derniers sabotages contre l'armée allemande à la "bataille de Montferrier-sur-Lez", qui tous tissent l'Histoire.
Deux dates ont cependant fortement marqué la chronique locale : l'entrée des maquisards, à partir du 26 août, et le défilé du général De Lattre de Tassigny, le 2 septembre. Deux événements que nous retraçons à travers cet album photos, dont certains documents sont inédits.
Dès la mi-août, la Résistance est déjà solidement implantée dans Montpellier. Jacques Bounin, alias "Maigret", futur commissaire de la République, a installé un état-major rue de l'Aiguillerie. Il prendra possession de la préfecture le 23 août. Mais c'est bien l'entrée du maquis de Mourèze, trois jours plus tard, puis le défilé des maquisards, qui symbolisent
ici la Libération.
Le cortège de l'armée de De Lattre, le 2 septembre, parachève cette période en un point d'orgue mémorable. La population montpelliéraine acclame cette fois un héros national. Comme Paris l'avait fait avec De Gaulle.
Maquis de Mourèze
Pendant des années, les maquisards de Mourèze, "maquis Bir-Hakeim", ont harcelé l'occupant, devenant un symbole de la Résistance dans la région (lire notre édition du 25 août). Avec de lourdes pertes, dont celles des commandants Capel et Demarne. C'est sous l'autorité du capitaine Rouan que ces maquisards quittent Mourèze, en camions, le 26 août 1944, pour faire une entrée triomphale dans Montpellier.
De Celleneuve à la Comédie, en passant par l'avenue de Lodève, la population acclame les résistants. Le plus entouré est l'aumônier-capitaine Level, un Montpelliérain qui compte de nombreux amis en ville et lutte dans le maquis depuis trois ans. Lorsque les maquisards arrivent sur la place de l'Œuf (la Comédie) " une ovation délirante se produit et la Marseillaise est cent fois reprise ", raconte la chronique de La Libération de Montpellier (Quillet-1945).
Cliché colonel Croft
Commandant Léon
Des républicains espagnols, qui avaient fui le franquisme, des officiers anglais parachutés et des anciens des Brigades internationales sont venus renforcer la Résistance. Parmi ces derniers :
le commandant Léon(à gauche). Juif polonais
d'origine, cette forte personnalité avait pris la tête d'un corps franc. Il surveillait Celleneuve pendant les événements de la Libération. L'homme sera ensuite chargé des exécutions capitales à Montpellier.
Les procès de l'épuration
La première cour martiale se réunit le 30 août, dans
la salle des assises. Elle prononce la peine de mort pour
le préfet Reboulleau et le chef milicien Cordier. Ils seront fusillés le lendemain. Au total, 72 exécutions ont été prononcées. Le bâtonnier Chardonneaux (debout)
et Me François Delmas, futur maire de la cité (à dr.), figurent dans les rangs de la défense. Car il en fallait une.
Archives Anglada
Son nom de code était "Toubib"
A 93 ans, chevalier de l'ordre national du Mérite et de la Santé publique, Adolphe Anglada constitue la mémoire vivante de la Résistance à Montpellier.
Manipulateur radio à l'hôpital, ce lieutenant FFI participait à l'admission clandestine de maquisards blessés, hospitalisés sous de faux noms.
Simone Demangel, grande figure de la Résistance locale, l'avait baptisé "Toubib".
Le triomphe du général De Lattre
C'est une grande date dans l'histoire locale de la Libération : le 2 septembre, le défilé du général De Lattre de Tassigny. Ce héros de la Libération est bien connu à Montpellier, où il commandait le XVIe corps d'armée au début de la guerre. Il avait rejoint De Gaulle lors de l'arrivée des troupes allemandes en 1942, avant de se couvrir de gloire dans la Résistance, puis lors des campagnes en Afrique et en Italie.
Ce 2 septembre 1944, De Lattre entre dans la ville à la tête d'un défilé composé de chars mi-lourds, de chasseurs de tanks, d'autos-mitrailleuses et de jeeps, avec des soldats de l'armée d'Afrique accompagnés d'une lionne mascotte ! (photo ci-dessous). Le cortège arrive par la route de Nîmes, puis remonte le Verdanson et le boulevard Henri-IV. Au niveau de l'arc de Triomphe, le commissaire de la République, Jacques Bounin, accueille le général (photo ci-contre). " Vous n'oubliez pas ce Languedoc où le peuple français s'est libéré tout seul et vous revenez à Montpellier chargé de gloire ! ", lance Jacques Bounin.
Fendant une foule en liesse, De Lattre et son état-major rejoignent ensuite la Comédie, via la rue de la Loge. Un dépôt de gerbes, puis un défilé militaire se déroulent sur l'Esplanade, devant des milliers de Montpelliérains. " L'armée française accueillera à bras ouverts tous ceux du maquis qui voudront continuer la lutte, déclare le général.
Ensemble avec les maquis, nous allons libérer le reste de la France, et surtout nos chères provinces d'Alsace et de Lorraine. "
De fait, de nombreux maquisards poursuivront leur glorieux parcours sous l'uniforme militaire. " La réception du général De Lattre marqua la fin des journées de la Libération. Mais les Montpelliérains goûtaient déjà une nouvelle vie. Ils avaient l'impression de respirer à plein poumons. L'air était redevenu français ", peut-on lire dans l'ouvrage
La Libération de Montpellier (Quillet-1945).
Documentation Robert Lacroix et photo Galdin
Etoile Bleue
Reconstituée dans l'urgence pour le défilé du général De Lattre, la fanfare montpelliéraine de l'Etoile Bleue livre, ce 2 septembre, un de ses premiers concerts de la Libération.
Positionnée à l'entrée du Peyrou, la fanfare scande l'arrivée du général, qui saluera son drapeau.
Au même endroit, De Lattre recevra des brassées de fleurs offertes par de jeunes Alsaciennes émues, réfugiées en Languedoc.