article NICE MATIN mai 2008:
Antibes : Le triste destin du NC 420, un hydravion hors du commun L'hydravion NC 420 au bout de la jetée de la base d'Antibes en 1943 avec en arrière plan le Fort Carré. Devant l'appareil, de gauche à droite : André Coste (chef de fabrication), Marcel Constum et André Guignard (mécaniciens navigants), Jules Drouet (chef d'équipe monteur) ; le dessinateur ; Lucien Coupet (pilote) et le gardien. : DR L'anse St Roch, devenue aujourd'hui 1er port de plaisance d'Europe, connut autrefois son heure de gloire comme base d'hydravions. Beaucoup d'Antibois se souviennent encore des lignes aériennes vers la Corse et la Tunisie mais qui a gardé trace en sa mémoire de l'hydravion NC 420 ?
C'était un appareil bimoteur militaire triplace, pilote, navigateur, radio mitrailleur, d'une longueur de 11, 20 m, d'une envergure de 15,90 m et d'une hauteur de 3,80 m. Son armement se composait d'une mitrailleuse avant, d'une arrière et il pouvait transporter 2 bombes, l'une de 62 kg, l'autre de 75 kg. Monoplan à coque métallique, il se distinguait des autres hydravions par son aspect insolite surtout ailes repliées pour son transport sur un navire militaire avec alors une envergure réduite à 4,75 m et a cause de sa verrière de la cabine de pilotage décentrée à gauche pour faciliter les manoeuvres de l'appareil. Cet hydravion devait être catapulté du navire sur lequel il était embarqué.
Le 8 mars 1937, la marine avait diffusé le nouveau programme de matériel de l'Aéronautique précisant les caractéristiques des avions et hydravions nécessaires à cette arme. Trois firmes, Gourdou, Bréguet et SNCAC (Société Nationale de constructions aéronautiques du Centre) étaient en concurrence pour le remplacement des appareils en service dont les derniers programmes remontaient à 1933 et 1935 en ce qui concernait l'aviation embarquée. Le 20 janvier 1939, 2 NC 420 seront commandés et la construction du prototype pourra commencer après l'acceptation de la disposition générale de la maquette. Optimiste à l'extrême, l'Amirauté, en février 1940, envisageait la sortie du prototype en juin 1940. N'oublions pas que la France était entrée en guerre contre l'Allemagne aux côtés de la Grande-Bretagne le 3 septembre 1939 et que le Maréchal Pétain nommé Président du Conseil le 16 juin 1940, signera l'armistice le 22 juin et deviendra chef de l'Etat Français en juillet pour pratiquer à l'automne une collaboration active avec l'Allemagne.
2 000 km... par le rail et par la route
Le sort du NC 420 demeura évidemment incertain vu les conditions et le diktat allemand. Le 28 juillet 1941, un protocole d'accord concernant « un programme franco-allemand de constructions aéronautiques » fut signé. Le 11 février 1942, le secrétariat d'Etat à l'aviation demanda l'inscription de la construction de 15 NC 420 au programme 1943-1944. Le prototype de l'appareil monté à Fourchambault, commune de la Nièvre, fut terminé en octobre 1942. C'est Lucien Coupet, chef pilote de la maison Farman qui fut chargé de superviser les essais de cet hydravion. C'est là où Antibes entre en lice. Notre ville dont la base était fermée depuis décembre 1938 et les hangars inutilisés fut choisie pour y effectuer le montage final de l'appareil et ses premiers vols. Fin novembre 1942, le NC 420 démonté et sans moteurs arriva à Antibes par train et fut amené à la base d'hydravions. Les 2 moteurs Béarn 6D07 arrivèrent à Antibes le 8 avril 1943. Enfin à la mi-juin 1943, le NC 420 était terminé et le 1er vol fixé au 1er juillet sous réserve d'autorisation des autorités italiennes. Le 1er et le 2 juillet, ce fut la vérification de l'étanchéité de la coque et de la stabilité de l'appareil sur l'eau. La décision définitive de vol approchait. Mais un événement, l'envol clandestin d'un petit bimoteur vers l'Algérie depuis le terrain de Cannes-Mandelieu, le 16 août, fit prendre de sérieuses mesures aux autorités italiennes par peur d'une fuite vers l'Afrique du Nord.
La suspension de toute activité sur le NC 420 fut décidée et l'appareil fut démonté et remisé dans son hangar antibois.
Entreposé dans une ancienne huilerie
En décembre 1943, le marché du NC 420 fut résilié par les autorités françaises qui n'en voyaient plus l'intérêt. L'appareil devient vite encombrant et il fut transféré par la route en 3 voyages en avril-mai 1944 à Flayosc dans le Var pour y être entreposé dans une ancienne huilerie désaffectée. Après le débarquement de Provence, nouveau déplacement vers Cannes la Bocca entre novembre 1944 et janvier 1945. Après une incursion à Marignane, les éléments du NC 420 transportés sur 2 camions furent dirigés sur l'ancien terrain Farman à Tonssus-Le-Noble dans la région parisienne. Début 1947, il s'y trouvait toujours en partie démonté et c'est là qu'il finira à la casse sans avoir jamais volé.
Destin extraordinaire et triste de cet hydravion qui parcourut environ 2000 km par le rail et par la route sans avoir pu quitter le sol par ses propres moyens. Il n'a volé que suspendu à la grue de l'Anse St-Roch !
Cet article a pu être réalisé grâce à l'aimable autorisation du magazine « Le fana de l'aviation ». Ses éléments ont été tirés de l'article de Gérard Bousquet publié par ce magazine en avril 1996 n°317.
Nice-Matin
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